AVIS DE TEMPÊTE, 2013
Carton, adhésif, cordes de chanvre, batteries de machines agricoles, gyrophares.
17 x 9 x 6 m.
Centre d'Art Rurart, Rouillé.
AVIS DE TEMPÊTE
Exposition personnelle
Commissariat : Arnaud Stinès
Centre d'art Rurart, Rouillé.
11.07.17 - 04.09.17
" La lumière orange éclaire l’espace d’exposition de manière saccadée. D’un peu partout le rythme des gyrophares anime la gigantesque structure tubulaire qui se dresse là, du sol au plafond, à travers tout l’espace. L’assemblage de milliers de tubes de carton quadrille le centre d’art pour former une architecture filaire omniprésente, un empilement de cubes qui matérialise le territoire qu’il occupe dans toutes ses dimensions. La lumière tournante des gyrophares (les mêmes que ceux que l’on trouve à l’arrière des engins agricoles) découpe l’espace au rythme des obstacles qu’elle rencontre, régulièrement, mécaniquement. Au fil de la journée et de la charge déclinante des batteries qui l’alimente, elle va décliner, cette lumière orange. Les gyrophares tourneront plus lentement, la lueur se fera plus faible, comme si la lassitude gagnait petit à petit le dispositif en place. Puis, pendant la nuit, les batteries seront rechargées, prêtes à affronter une nouvelle journée, jusqu’à la nuit suivante. Des cordes descendent du plafond. Au rythme stroboscopique des faisceaux lumineux, elles apparaissent ça et là dans l’installation, se confondant avec a colossale cage de carton. D’épaisses cordes de chanvre qui s’enroulent sur le sol. Des cordes à se pendre.
Cette œuvre, Laurent Lacotte tenait à la réaliser depuis longtemps et a trouvé à Rurart les conditions nécessaires et le contexte pertinent pour sa finalisation. Elle s’appuie sur une réalité sociale, le mal- être de plus en plus important de nombreux agriculteurs qui doivent souvent faire face à la fois à une situation économique qui se dégrade, à l’angoisse liée à un avenir incertain, à l’inquiétude de voir se perdre le patrimoine familial, à l’isolement et à la solitude affective parfois. D’après une enquête réalisée par l’Institut national de veille sanitaire en 2010, avec près de 400 cas par an le taux de suicide chez les agriculteurs est trois fois plus important que chez les cadres. La pièce monumentale de Laurent Lacotte trouve ses racines dans ce tabou. Les matériaux pauvres, communs, si communs qu’ils en deviennent invisibles au quotidien. Des matériaux dont la valeur marchande est dérisoire. Des matériaux interchangeables, bons à jeter. Comme ces hommes dont le travail de Laurent Lacotte met en évidence la condition sociale. L’œuvre de carton est périssable, éphémère et fragile.Prête à être détruite sitôt construite, elle semble faire écho à l’équilibre instable sur lequel repose le monde contemporain, où la précarité pointe pour beaucoup, au vent violent du libéralisme. Avis de tempête. Si le titre de l’exposition fait référence au monde agricole, pour lequel la tempête est peut-être vécue de manière encore plus dramatique dès lors qu’elle menace les récoltes, source de revenu annuel dont dépend la subsistance des familles, il renvoie aussi à une réalité sociale plus large, la tempête économique frappant, elle, sans relâche, sans distinction, sans frontière. "
Arnaud Stinès, 2013
Laurent Lacotte art
Laurent Lacotte artiste